vendredi 26 février 2016

Les accélérations du guépard mesurées précisément : données disponibles


Le guépard est très rapide ... oui mais combien ?

Le guépard (Acinonyx jubatus) est considéré comme l'animal terrestre le plus rapide, mais en fait on sait assez peu de ses performances réelles lors de la chasse. Wilson, A. M., et al. (2013) ont mesuré avec un collier GPS et un accéléromètre la dynamique locomotrice et le succès de la prédation de 367 sprint de chasse Guépards au Botswana. Une vitesse maximale de 25.9 ms−1 (93kmh−1)  a été enregistrée mais la plupart des chasses se font à des vitesses plus modérées. Par contre ces chercheurs ont enregistré des accélérations positives et négatives en avant et latérales, ainsi que des puissances par rapport la masse corporelle parmi les plus élevées pour un animal terrestre. C'est peut-être la première série de données aussi précises de la dynamique de chasse d'un grand prédateur dans son environnement naturel.



Fig 1:  a) Le guépard avec le collier GPS-accéléromètre et les adaptations anatomiques qui contribuent à sa performance.Notez les griffes non-rétractiles c) et la décélération intense en d)  b) g: gravitation v2 r−1  V2r = accélération centripète, a =est l'accélération  résultante [img] source Wilson, A. M., et al. (2013)



Le déplacement du Guépard n'est pas rectiligne ni uniformément accéléré...

Wilson, A. M., et al. (2013) (Les membres Expériment@l peuvent obtenir ces articles) ont mesuré avec un collier radio pesant 340 g alimenté par des panneaux solaires,comportant un GPS, trois accéléromètres (X, Y, Z) et trois gyroscopes (trois angles de rotation) 367 sprints de chasse chez  trois femelles et de deux mâles.
Les données (fig 2.)  montrent des périodes de déplacement tranquille et des accélérations très rapides lors des sprints finaux, notamment des accélérations latérales très fortes (fig 2b) où le guépard doit exercer une force centripète (les modèles naifs des élèves leur feront peut-être dire qu'il lutte contre la force centrifuge ?)


Figure 2 : Trace GPS d'un guépard durant 11h (les données GPS sont disponibles en tant qu fichier Google Earth dans la Supplementary File 1) Chaque marque circulaire indique une  position établie par GPS. Les couleur indiquent le type de mouvement du Guépard : détails dans Supplementary info) [img] source Wilson, A. M., et al. (2013)


Des données authentiques disponibles à chacun

Wilson, A. M., et al. (2013) nous proposent un exemple de leurs données GPS en tant qu fichier Google Earth dans la Supplementary File 1 ( j'ai du renommer en .KML le fichier pour qu'il soit reconnu)

  • Supplementary Data (8.1 KB)
    This KML (Google Earth) file contains the GPS positions of the cheetah over an 11 hour period. To view, Google Earth must first be installed from www.google.com/earth/index.html, then double click on the file to open it. To see the cheetah's movement through time you can slide the bar in the top left. The markers are colour coded by collar state such that Alert:blue, Mooch:green, Ready:yellow, Chase:red.


Figure 3 : Trace GPS d'un guépard durant 11h affichées dans Google Earth à partir de  la Supplementary File 1source Wilson, A. M., et al. (2013)
 
Ainsi on peut extraire des données réelles de position et d'accélération, situer le guépard à différents moments, identifier des fragments de tracé qui sont (presque) rectilignes ou de vitesse constante voir dériver des vitesses, et des accélérations qu'on peut comparer aux accélérations enregistrées par les accéléromètres.

Le MRUA c'est bien, mais ça reste assez artificiel pour les élèves …

Evidemment on ne peut pas confronter les élèves à  des modèles de mouvement  complexes construits par des chercheurs qui mêlent accélérations variables, linéaires et/ou centripètes à partir de  données issues de mesures discrètes.

Est-ce pour autant impossible de partir de ces données ou de conduire les élèves à sélectionner un sous-ensemble de données authentiques bien choisies ... pour les rendre capables d'utiliser le modèle MRUA et voir comment il les aide à mieux comprendre le monde qui les entoure ?  Le PER nous y incite en effet  " problématiser des situations, de mobiliser des outils et des démarches, de tirer des conclusions fondées sur des faits, notamment en vue de comprendre le monde naturel " et le plan d'études du secondaire II aussi  "aperçu des concepts fondamentaux de la Physique et de leur application aux phénomènes naturels"

Peut-être que selon les programmes et les options certains enseignant voudront p. ex extraire un segment de droite de la trace GPS / son temps et en mesurer la vitesse ?  ou confronter une mesure sur l'ensemble d'un long tronçon selon le modèle MRU aux vitesses que les chercheurs donnent ? ou mesurer l'accélération latérale en dérivant la position dans une partie du trajet où il poursuit sa proie  ? 
Ou au contraire montrer que les lois de Newton permettent d'expliquer pourquoi l'animal ne peut pas freiner instantanément ?  D'expliquer pourquoi c'est un problème de tourner si on est plus lourd ...
Y aurait-il d'autres usages ?
Eventuellement exploiter ces données pour vérifier / mettre en défaut cette conception naïve classique répertoriée la l'AAAS Force and Motion
FMM107 If an object is slowing down, a force that was moving it forward must be decreasing (Clement, 1982; Watts & Zylbersztajn, 1981).

Des statistiques de chasse: c'est pas la vitesse, c'est la décélération et l'accélération latérale …

Les chercheurs ont établi des statistiques montrant que le guépard n'a réussi à atteindre sa proie que dans 25% des cas. Sur la figure 4, on voit que le terrain joue un certain rôle : les auteurs indiquent que le félin ne doit pas tellement son succès à ses pointes de vitesse, mais plutôt à sa capacité de décélération puisqu'il ralentit à l'approche de sa proie plus légère qui fuit en zig-zag (la proie faut  typiquement moins de 50Kg contre 70 pour le guépard) c'est alors l'accélération latérale qui est décisive : réussir à tourner assez vite alors qu'un prédateur plus rapide serait emporté par son élan lors d'un écart de la proie.
Successful hunts involved greater deceleration on average (−7.5ms−2 versus −5.5ms−2; P<0.05; Fig. 4d), but there was no significant difference in peak acceleration (Fig. 4d), distance travelled (Fig. 4b) number of turns (6.7 versus 6.5) or total turn angle (347° versus 260°) (generalized linear mixed model (GLMM); Methods). This indicates that outcome was determined in the final stages of a hunt rather than hunts being abandoned early to save energy or reduce risk of injury, and the higher deceleration values may reflect actual prey capture. Wilson, A. M., et al. (2013)

Figure 4 : a) vitesse maximale atteinte lors d'un sprint, moyennée sur une foulée, codée en couleur selon le succès , b) distance parcourue à chaque sprint final , c) vitesse maximale codée en coouleur selon le type de terrain d) pointes d'accélération et décélération atteinte à chaque sprint.  e) nombre de sprint enregistrées en fonction de l'heure du jour f) exemple d'enregistrement d'un sprint codé pour la vitesse ( rouge vif le plus rapide) avec les vecteurs d'accélération horizontale indiqués dans la partie de G.    [img] source  Wilson, A. M., et al. (2013)

Et en français ? 

On peut trouver de très bonnes ressources :
C'est intéressant de voir qu'elles cherchent à simplifier - et le font bien. Mais elles ne vous proposent pas l'accès aux données d'origine. Expériment@l-Tremplins s'adresse à des physiciens, chimistes biologistes et vous considère comme très capables de le faire de manière adaptée à vos publics et vous met en contact avec la recherche originale...  

Sources

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Les ondes gravitationnelles, des vagues dans les médias, mais des infos assez vagues !



Les ondes gravitationnelles :

Alors que la découverte des ondes gravitationnelles à presque fini de faire des vagues dans les médias, en se gargarisent d'Einstein par ci et par là mais en donnant des infos assez vagues ( désolé c'était trop tentant j'ai pas pu résister) pour satisfaire l'appétit de scientifiques comme vous le 20minutes ne suffit peut-être  pas


Vous préférez Nature ou Science  ?

Expériment@l-tremplins vous propose : Gravitational waves: a three-minute guide


  Nature Video explains how scientists are searching for ripples in space-time.
11 February 2016


How to find gravitational waves


Fig 1: une vidéo de 3 minutes explique comment on a mesuré les ondes gravitationnelles  [img] source : Gravitational waves: a three-minute guide. (2016). Nature. 10.1038/nature.2016.19366

Almost exactly a century after Einstein first predicted the existence of gravitational waves, physicists at the recently upgraded Laser Interferometer Gravitational-Wave Observatoryare widely expected to announce that they have detected these cosmic ripples in spacetime.


 

In this Nature Video, reporter Davide Castelvecchi explains what gravitational waves are, and how scientists are searching for them in an attempt to prove Einstein right.
Follow the announcement live with Nature's reporters at our "LIGO live" page.

ça ne vous suffit pas ?

  • Castelvecchi, D. (2016). Gravitational waves: How LIGO forged the path to victory. Nature, 530(7590), 261‑262. http://doi.org/10.1038/530261
  • Cho, A. (2016). Gravitational waves serve up a mystery. Science, 351(6275), 796‑797. http://doi.org/10.1126/science.351.6275.796
  • Et bien plus à partir de ces articles ... pour les membres de Expériment@l-Tremplins
Journal title:Nature News
Date published
-

samedi 6 février 2016

Fermi des bois

FERMI DES BOIS


Auteurs: Andreas Müller, Cedric Loretan et François Lombard

La contribution suivante entre dans le cadre du raisonnement par ordre de grandeur, ou des « problèmes de Fermi » (des calculs simples d'ordre de grandeur), dont l'importance pour la démarche scientifique en général, et pour la maîtrise des disciplines scientifiques  individuelles a été évoquée plusieurs fois dans Expériment@l [1 et 2 pour des exemples en biologie].
Le sujet traité est un facteur crucial pour la biosphère terrestre, et il s'avère que la valeur publiée dans « Nature » peut être comprise dans son ordre de grandeur par un raisonnement mathématique simple.

1 Question de Fermi

Récemment, Nature a publié un article [3] proposant la première carte à l'échelle mondiale de l'étendue des arbres forestiers. Cette dernière révèle que le nombre total d'arbres (Na) sur Terre est d'environ  3*1012.
Pouvons-nous estimer ce nombre à partir de simples outils arithmétiques et de données facilement disponibles ?

2 Réponse

Afin de répondre à cette question essayons tout d'abord d'estimer la surface de terre émergée sur Terre. Pour ce faire calculons la surface de notre planète. En la considérant comme une sphère sa surface sera d'environ (en prenant la valeur de 3 pour π) :4*3*6000= 12*36*10≈ 4*108km2. Et si environ 75 % de notre planète sont recouverte par les eaux, alors la quantité de terre émergée serait d'environ 10km2.
Quelle fraction de ces terres est maintenant recouverte par des forets? „United Nations Environment Programme" (UNEP [4]), qui établit et propose de nombreuses informations de nature environnementales permettant aux nations d'améliorer leur qualité de vie sans compromettre celle des générations futures, met à disposition une carte (image 1) qui présente la couverture par les forêts des différents continents.
Image 1 : couverture forestière en pourcentage de la superficie totale du pays (source : http://www.unep.org/vitalforest/)
En tenant compte que certaines régions sur Terre ont une couverture forestière quasiment inexistante (Sahara, les pôles) et d'autres au contraire une couverture qui avoisine les 100% (forêts tropicales d'Asie du Sud-Est ou encore la forêt Amazonienne) une bonne approximation alors de la couverture moyenne serait d'environ 30%.
Pour résumer nous avons une surface de terre émergée d'environ: 10km2 = 100*106km2 et une couverture forestière d'environ 30%. Cela nous donne une surface couverte de forêt (AF) d'environ:
AF ≈ 30*106 km2
Une dernière valeur qu'il nous reste à estimer est la densité de ces forêts. Ou plutôt quelle surface est utilisée par les arbres (espace vital). Cela peut facilement être estimé à partir de données directement observables. Pour une forêt dense la distance moyennedaa entre les arbres est de l'ordre du mètre, alors que pour une forêt clairsemée la valeur serait plutôt d'une dizaine de mètres. Face à une limite inférieure et supérieure, exprimées en ordre de grandeur, une estimation raisonnable pour calculer cette distance moyenne serait la moyenne géométrique [5] :
daa =  (1m * 10m)1/2 ≈ 3m
Et selon le petit schéma ci-dessous, l'arbre occupe ainsi une surface d'environ 10m2.
Il nous reste plus qu'à comparer l'espace vital moyen de nos arbres (10 m2) avec AF pour obtenir N:
N= (3 * 1013 m2/10 m2)= 3 * 1012
Ainsi avec de simple outils arithmétiques accompagnés de données directement observables nous obtenons le même résultat que celui proposé par l'article publié dans Nature, à savoir  3*1012 arbres.

3 A quoi peut servir ce calcul ?

Les médias bombardent les élèves de chiffres souvent présentés comme des vérités.
Développer l'esprit critique chez les élèves est un des objectifs du PER. Les rendre capables de trouver des données puis de vérifier l'ordre de grandeur  pour confirmer ces chiffres c'est leur donner une force. Etre capable de se poser la question « est-ce vraiment possible ? » ou « sur la base de quoi ils disent cela ? »  ou encore « je veux bien vous croire, mais permettez que je vérifie un peu… »  c'est donner à nos futurs citoyens une force (empowerment) qui les aide à dépasser le simple rôle de consommateur passif dans une société de l'information.

4 Références

1. Müller, A. (2013). Que sont les problèmes de Fermi ?
https://experimental.unige.ch/category/problemes-de-fermi-des-calculs-simples-pour-comprendre-le-monde/
2. Lombard, F. (2015). Qui a dé-chiffré la biologie?
https://experimental.unige.ch/2015/04/04/qui-a-de-chiffre-la-biologie/
3. Crowther, T.W & al. Mapping tree density at a global scale. Nature. 2015 Sep 10;525(7568):201-5. doi: 10.1038/nature14967. Epub 2015 Sep 2
4. http://www.unep.org/vitalforest/
5. L. Weinstein and J. A. Adam, Guesstimation: Solving the World's Problems on the Back of a Cocktail Napkin, Princeton University Press (2008), ch. 1.



Permettre aux aux élèves de faire de la physique des particules


De magnifiques opportunités pour faire participer les élèves à la physique des particules


Master Class en physique des particules – 2016


En Mars 2016 le «International Master Class en physique des particules», organisé par le «International Particle Physics Outreach Group» (IPPOG), se déroulera pour la douzième fois. Chaque année, environ 10'000 étudiants de plus de 40 pays se rendent à une des 180 universités et centres de recherche afin d'explorer le monde des particules élémentaires. En Suisse, sous le patronage de l'Institut Suisse de Physique des Particules (CHIPP), les universités de Berne, Genève et Zurich (avec l'ETHZ) invitent pour cette occasion les étudiants intéressés de participer le 3 Mars à Berne ou à Genève, ou le 18 Mars à Zurich. Le sujet du jour: «Découvrez le monde des quarks et des leptons avec des données réelles». Vous trouverez des informations générales sur le «International Master Class» sous http://www.physicsmasterclasses.org. Ainsi que d'autres ressources qui pourront vous servir comme renseignement. Nous vous recommandons également le matériel informatif dans les cites du CERN pour l'éducation et pour la formation continue des enseignants: http://education.web.cern.ch et http://www.physiquedesparticules.ch

Inscription: Les étudiant(e)s intéressé(e)s s'inscrivent par leurs enseignants dans une des trois établissement:
Berne: Mme Marcella Esposito <marcella.esposito@lhep.unibe.ch>, avant le 26 février
Genève: Mme Catherine Blanchard <catherine.blanchard@unige.ch>, avant le 26 février
Zurich: Mme Carmelina Genovese <carmelina.genovese@physik.uzh.ch>, avant le 11 mars

[1] Hands on Particle Physics Masterclasses,
http://www.physicsmasterclasses.org/index.php?cat=physics
CERN, Beamline for Schools Competition 2016 (français en bas)

Le CERN offre à des élèves du secondaire du monde entier la possibilité de concevoir et de réaliser leur expérience sur une ligne de faisceau de l'un de ses accélérateurs. Découvrez la ligne de faisceau et ses infrastructures sur le site internet http://cern.ch/bl4s. Puis imaginez-vous une expérience simple et innovante et envoyez nous une description écrite de votre projet ainsi qu'une courte vidéo avant la fin mars 2016.
Inscription:
http://cern.ch/bl4s Contact: beam-line-4-schools@cern.ch

[2] Beam and detector,
http://beamline-for-schools.web.cern.ch/sites/beamline-for-schools.web.cern.ch/files/BL4S-Beam-and-detector_0.pdf